Cette histoire ne commence pas avec moi, elle remonte à mon père, à ma mère, à ma famille. Je leur dois ce que je suis. Je suis leur porte-drapeau, leur étendard. Personne ne pouvait imaginer à ma naissance que je porterai tant de poids, tant d'espoir, au sein de cette communauté. Je suis devenu en quelque sorte l'élu, celui qui sait lire celui qui sait écrire, celui qui va à l'université, celui qui portera la parole des autres. Ce livre je ne l'écris pas pour moi, je l'écris pour ma famille, pour mes amis, pour tous ceux qui sont restés au Congo. Je l'écris pour leur dire que tout est possible, que l'on peut y arriver, qu'il y a des embûches, qu'il y a des drames, que la vie est ainsi faite, mais qu'à la fin, quand on regarde le chemin parcouru, on se rend compte qu'on a réussi ! Parfois, je me demande si cet accident, le jour où j'ai perdu ma main, ma main droite, ma main d'écriture, ma main qui devait me permettre de devenir un brillant avocat, cet accident, n'est-il pas la suite de la malédiction qui avait été lancée contre ma mère ? En tout cas, je la combats chaque jour, en restant en vie, en allant à l'université, en suivant la route que je me suis tracée.